La famille Devil Crash

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La genèse

En jeu vidéo, ce n'est quand même pas pareil. D'une part, il faut acheter le jeu. Et je ne sais pas pour vous, mais perso j'aurais quand même un peu honte de m'acheter un jeu de flipper ; quelque part au fond de moi ça me donne l'impression de régresser vidéoludiquement parlant, un peu comme si je jouais à Léa : la passion vétérinaire.

Il reste bien les freewares sur ordi, mais il ne faut pas s'attendre à un gameplay abouti. Il y a une bonne dizaine d'années, à l'époque où les démos de jeu ne pesaient pas 20 Go, les magazines informatiques en fournissaient toujours sur leurs CD de démos. Les patterns de jeu étaient tellement basiques qu'on craquait vite des scores de fou, et même si certains jeux reproduisaient des flippers réels (qui a joué à Eight Ball Deluxe ?), on était quand même loin du compte.

Non, les jeux de flippers, c'est nul. Sauf quand ils ne se prennent pas pour des flippers, et offrent autre chose. Comme, par exemple, la série de Naxat...


 Nom : Alien Crush
Développeur : Naxat
Année : 1989
Console : PC Engine

Sorti uniquement sur PC-Engine, Alien Crush est un flipper franchement original pour l'époque. Tout d'abord par son environnement : pour ceux qui n'auraient pas deviné, le thème du flipper est le film Alien, et donc les bumpers, rampes et autres cibles sont incarnés par différentes versions de la bébête de Giger. Par exemple les slingshots sont des larves qui éclosent au bout de plusieurs impacts, libérant un bébé alien que vous devez abattre.

Ensuite, le flipper est composé de deux tables superposées, et il est facile de passer de l'une à l'autre. Malheureusement le passage est brutal, et se fait sans scrolling ; et comme il est fréquent de faire des aller-retours rapides (sans d'ailleurs contrôler grand chose), on ne comprend parfois plus grand chose à l'action.

 Alors, ça c'est la table du haut...
...Et celle-là, celle du bas. Ouh, ça fait peur !

Elément original pour un flipper, il existe des combats contre des boss : en respectant certaines positions, il est possible d'accéder à deux zones spéciales. Ne pas vaincre ces boss ne fait pas perdre de vie, mais à contrario, réussir l'épreuve rapporte pas mal de points.

La chasse aux points est le seul objectif du jeu, puisqu'il n'a pas de fin. Normal pour un flipper, remarquez. Pourtant il est peu probable que vous passiez beaucoup de temps à exploser votre high score. Le jeu est un peu juste techniquement ; la faute aux tables, qui manquent de relief, et aux musiques insipides. De plus, on ne peut pas dire que l'action soit débridée : le jeu est vraiment très facile, grâce en partie à une physique de la balle des plus étranges : celle-ci semble adhérer aux parois, jusqu'à parfois défier la gravité en interrompant sa chute avant de remonter !

Et les deux tableaux bonus. L'avantage de ce jeu, c'est qu'on peut le présenter de
façon exhaustive en seulement 4 screenshots.


Enfin les objectifs sont vraiment peu nombreux, et seuls les stages bonus rompent la monotonie de l'ensemble.  Il est dommage de constater qu'Alien Crush, malgré ses deux tables, offre finalement moins de possibilités que bon nombre de vrais flippers de l'époque. Un jeu plutôt plaisant au début, mais assez limité.


 Nom : Devil Crash (Japon) / Devil's Crush
Développeur : Naxat
Année : 1990
Console : PC Engine

Devil Crash (Devil's Crush chez nous) est la suite officielle d'Alien Crush, et en reprend les bonnes idées en les améliorant.

Le thème des Aliens a été abandonné au profit d'une ambiance medievalo-fantastique, avec sorciers, dragons et autres bestioles indéfinissables mais peu ragoûtantes. De plus, cette fois-ci le flipper compte 3 tables au lieu de deux, et la transition est (enfin) réalisée à l'aide d'une scrolling, ce qui améliore grandement la visibilité et donc la jouabilité. Enfin, Devil Crash reprend le système des stages bonus, et l'améliorant : ces stages sont plus nombreux (sept en comptant le combat final), et plus difficiles, ce qui les apparente à des combats contre des boss.


Les tables sont rapidement très animées.
Abattez les têtes du dragon sans vous faire piéger par les rebonds de la bille sur les œufs !

Une table de plus, ce pourrait être 50% de possibilités supplémentaires ; en fait, on est plus proche du double : le flipper regorge de cibles, mouvantes ou fixes, de bonus et de cachettes, et les conditions requises pour accéder aux boss (et pour les vaincre) sont plus nombreuses et parfois un peu retors. La physique de la balle a été grandement améliorée, et le jeu est devenu bien plus difficile que son prédécesseur, les repêchages miraculeux ayant disparu.

Mais ce n'est pas seulement sa richesse qui a fait de Devil Crash un jeu culte, c'est également son ambiance : les graphismes sont d'une grande richesse, avec un réel souci du détail, avec comme point d'orgue le fameux visage de femme de la table centrale, devenu l'élément emblématique du jeu. Les tables sont toujours en mouvement, et l'impression de relief est bien mieux rendue que dans Alien Crush, grâce à un meilleur choix au niveau des couleurs.


Ce bonus stage est un des plus simples du jeu.
Bonjour mademoiselle, vous voulez boire un verre ? Ah, je crois que non...

L'ambiance, cependant, est loin de reposer toute entière sur les graphismes du jeu : car s'il est bien un élément qui est resté dans les mémoires (en plus du fameux visage de femme cité plus haut), c'est bien sa musique. Seuls deux thèmes vous accompagnent durant le jeu : celui des boss, et le thème principal. Ce dernier est tout bonnement inoubliable, tant par sa mélodie que son orchestration. Assez long, il a le mérite de ne jamais lasser le joueur, et mérite tout à fait, à mon humble avis, une place dans le top 20 des meilleurs musiques de l'histoire des jeux video.

Il est franchement difficile de trouver des défauts à Devil Crash : sa technique irréprochable, son gameplay aux petits oignons et son ambiance unique en font un incontournable de la PC Engine. Il possède le fun immédiat du flipper et l'ambiance et la richesse d'un shoot'em up.
 Tout juste peut on regretter le fait que parfois, la bille s'emballe un peu et qu'on la perde sans vraiment pouvoir réagir, mais après tout c'est le propre des flippers...

A noter que le jeu possède une fin : pour accéder au dernier boss, il "suffit" de dépasser le score maximal, à savoir 999 999 999 points. Facile, non ?


La table du haut est la moins intéressante des trois, mais ce n'est pas la plus moche...
 Il est possible d'avoir deux paires de flips en remplissant certaines conditions (qui m'ont échappées, je l'avoue).

Contrairement à son aîné, Devil Crash a eu les honneurs d'une conversion Megadrive. Nommée Devil Crash MD au Japon et Dragon's Fury chez nous, et réalisée par Tehcnosoft, celle-ci comporte quelques différences avec l'originale : les graphismes ont été améliorés et sont vraiment impressionnants, avec un changement global des tons, et les bonus stages ont été grandement modifiés : certains ont disparu, d'autres les ont remplacé, et leur difficulté est globalement plus importante. La musique est également meilleure à mon goût.

Petit défaut : le jeu n'est plus en plein écran, puisqu'une bande sur la droite de l'écran est maintenant dédiée au bilan des bonus stages. Les deux versions ont leurs aficionados, perso la version MD, avec son 6è bonus stage qui semble tout droit tiré de Gynoug, est celle que je préfère, mais après tout chacun ses goûts...

L'écran-titre de la version occidentale.
Vous êtes sûre que vous ne voulez pas un café ?

 Certains bonus stages ont été retouchés...
...tandis que d'autres ont été créés pour l'occasion.