Wings Of Death - Lethal Excess.

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"Xenon 2, Xenon 2, Xenon 2, Xe..."

C'est ce que répondent en général, à la manière de robots décérébrés, l'AtariSTE et l'Amigaïste moyens quand on leur dit "Shoot 'em up".

Tsk, tsk, tsk. Et bien moi je dis NON. Et je m'insurge. Xenon 2 est très bon (comme tout ce qu'ont fait les Bitmaps Brothers, ces géants du 16-bits des années 90), mais ce n'est pas
LE meilleur. Une série de deux jeux est passée au travers des mailles du filet commercial. La presse (française) en a peu parlé, et c'était HYPER chaud de les trouver sur les rayons des revendeurs. Mais bon, Mozart ayant bien été enterré dans une fosse commune, un site qui a comme devise "Les jeux video ont aussi leur histoire !" se doit de passer outre les intérêts bassement commerciaux qui font que tel jeu marche ou pas, et de réparer les erreurs de marketing afin de rendre leur dignité aux bons jeux méconnus.

Joueurs, Joueuses, on vous exploite, on vous spolie, et je vous convie, moi, Marskilla, au travers de cet article militant et bourré de superlatifs, à un hommage. La célébration de ce qui s'est fait de mieux en matière de shoot'em up sur ATARI/AMIGA. Et j'espère bien, qu'après avoir lu ceci, quand on dira à un AtariSTE / Amigaïste moyen "Shoot 'em up" il répondra :

"Lethal Excess, Wings Of Death, Xenon 2, Lethal Excess, Wings Of Death, Xenon 2, Leth..."


  • Nom : Wings of Death
  • Editeur : Thalion
  • Développeur : : Eclipse
  • Année : 1990
  • Plateformes : Atari STf - STe / Amiga
  • Genre : Shoot 'em up

Le Jeu

Ici, pas de scenario. Enfin, pas textuellement en tout cas. Et du moins, pas que je sache. Et puis, pas dans le jeu. En tout cas, Eclipse n'a pas pondu quelques phrases débiles au milieu de l'action pour mettre un scénar sur un shoot.

C'est pas ça un shoot 'em up, ça fait appel à nos instincts les plus bassement primaires : ceux de destruction. Destroy, kill, kill, massacre, bonus, arcade, boss, évitage de tirs, boum, blast, pan dans ta face de rascasse. Voilà ce qu'on cherche quand on se fait un jeu comme ça (enfin ce que, moi, je cherche, ne faisons pas de généralités, vous valez mieux que ça).


Tiens, un clin d'oeil à Xenon 2 dans la salle 'ARTEFACTS' : regardez le vaisseau entreposé à droite...

Mais ce n'est pas pour autant qu'un shoot 'em up doit être dénué d'une âme (guerrière certes, mais d'une âme quand même). C'est visuellement que l'histoire et l'ambiance de Wings of Death va être racontée, les graphismes étant le support principal de l'atmosphère.

Oh, bien sûr le manuel fait vaguement référence à une vilaine sorcière Xandrila qui a foutu le boxon... Vous, qui répondez au nom de Sagyr, avez été ensorcelé. Vous avez changé de forme comme dans Altered Beast ou Toki, va falloir lutter pour récupérer forme humaine... vous êtes grave véner, ça va donc ruer dans les brancards. Gna gna blah blah patati et patata. Passons.

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C'est la société Thalion qui s'est chargée de la distribution commerciale du jeu. On leur doit des titres comme : A320 Airbus, No Second Prize, Chambers Of Shaolin... si ces titres ne vous disent rien, sachez que ce ne sont pas des petits joueurs.

Directement issus de la demoscene -où le code est élevé au rang d'art majeur-, cet éditeur teuton n'a produit QUE de la qualité. D'ailleurs les membres fonderont plus tard la société Ascaron, plus connue des joueurs PC de nos jours (Sacred, Port Royale...)

Le jeu est donc de très bonne facture. Comme l'intro excessive de cet article vous l'a laissé entendre, ce premier opus fait partie des meilleurs shoot 'em up des plateformes ST/AMIGA. Force est de reconnaître que ce n'est pas bien dur : on peine en effet à trouver sur ces machines les sensations que l'on obtient avec les cadors du genre (DoDonPachi sur Arcade, Soldier Blade sur PCengine...).

Et pourtant, Wings Of Death (WoD, de son petit nom) tire son épingle du jeu. Bon ok, "tirer son épingle du jeu" ne signifie pas rivaliser : on est loin du fun jubilatoire des titres précédemment cités, mais le jeu reste agréable, y compris sorti du contexte de pénurie de shoot de qualité sur les machines hôtes de ce jeu.

En parlant de ces machines, les versions ST et AMIGA sont très très proches. Seule la musique diffère quelque peu (ni mieux, ni moins bien : différentes). A titre d'info, c'est la version ST(e) qui a été utilisée pour rédiger cet article.

La couverture du manuel
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Ils sont bien les squelettes de chez Eclipse: quand ils vous voient, ils font un signe de tête.

Enfin, en ce qui concerne le jeu, tous les ingrédients du shoot sont là : des ennemis, un scrolling, des bonus, des boss et la nécessité d'utiliser le bouton tir avec un marteau piqueur.

Le jeu est à scrolling vertical ; pour ceux qui envoient des courriels (et pas des mails) et qui demandent dans la restauration rapide des menus florilège (et non des menus BestOf (tm)(c)-pas touche à la marque sinon procès- au fast food), sachez qu'un "scrolling" signifie à peu près déplacement de l'écran de fond. A contrario d'R-type, par exemple.

Les ennemis sont variés tout comme leurs trajectoires sur l'écran. Les patterns de balles (schémas de projectiles ennemis) sont peu répétitifs, ce qui donne un style assez intéressant.

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Lui, il me fout les boules.

En ce qui concerne les bonus, on se rapproche vraiment d'un jeu d'arcade. Déjà quand on en choppe un, une voix digitalisée clame son nom. Plutôt rare sur ces plateformes.

En ce qui concerne les armes, chacune d'entre elles vous fait changer de forme. Si vous prenez plusieurs fois de suite la même votre tir gagne en puissance. Chacune des armes a 5 niveaux. Inutile de vous dire que quand vous avez les cinq niveaux vous faites mal. Par contre quand vous mourez, vous repartez tout petit, et c'est tout de suite plus dur. Ce phénomène est connu dans les shoots sous le nom de : syndrome de RAIDEN.

Si vous avez bien suivi, pour atteindre le niveau d'arme le plus haut, il vous faudra éviter les bonus qui ne sont pas de votre type, ce qui fait un élément de plus dans l'établissement de votre trajectoire.

Récapitulatif des power-ups:

Thunderballs : ce bonus vous change en gargouille, vous tirez une salve continue de boules. Plus vous montez dans le niveau de cette arme, plus le chemin des boules se divise et couvre l'écran. Cela dit la gargouille est plutôt lente.
Dragonfire : vous permet de balancer de grosses boules de feu sous la forme d'un dragon.
Circleblast : l'arme la plus originale du jeu. L'essayer c'est l'adopter. En plus vous êtes transformés en chauve-souris, bon admettons. J'ai peur des chauves souris !
Power Beam : Vous êtes transformé en aigle et tirez un rayon constant. Plus les niveaux augmentent, plus le rayon se "ballade" et couvre l'écran.
Spitfire : C'est sous la forme d'une libellule que vous tirez des triangles. Arme classique du shoot s'il en est.
Life : Une vie supplémentaire.
Energy : Remet votre barre de dommage à zero.
Smart Bomb : Fait tout peter à l'écran.
Destroyer : une boule d'acier tourne autour de vous et vous protège.
Hunter : ceci agit comme un missile téléguidé... très destructeur mais éphemère.
Speed : augmente votre vitesse d'un cran .
Shield : vous êtes temporairement invincble.
Autofire : vous permet de tirer des salves au lieu de bourriner votre bouton feu. Il y a plusieurs niveaux d'autofire, et le premier est assez lent.
500 : A part pour les scoreurs, ce bonus de 500 points ne sert pas à grand chose.
L'attrape-nigaud : votre arme retombe au niveau 1, vous perdez de la vie et pour couronner le tout, la voix rigole en se fichant de vous.

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Ce boss s'appelle Gate, Bill Col Gate.

Le jeu vous octroie 5 crédits, lorsque vous perdez vos vies, retour au menu et le jeu vous propose soit de commencer une nouvelle partie (Allez les hardcore gamers !!!), soit de continuer au début du niveau où vous avez trépassé. Pour perdre une vie, il faut perdre toute son énergie. Pour perdre son énergie, et bien il faut se faire tirer dessus ou entrer en collision avec les vilains pas beaux. Selon le type de dégâts on perd plus ou moins d'énergie.

D'ailleurs, on ne "perd" pas d'énergie. En fait, voyons les choses avec l'angle inverse, on prend des dégâts jusqu'à perdre une vie. C'est le principe matérialisé par la tête de mort qui fait progresser un éclair jusqu'a une boule :

Je trouve la difficulté du jeu extrêmement bien dosée : la juste mesure en toute chose (ce qui fait un gentilhomme). Enfin si ce n'est pas votre cas, vous trouverez ci-dessous un cheat code. Il a été volontairement masqué pour ne pas gâcher le plaisir des core gamers. Si vous voulez le voir sélectionnez avec votre souris le texte dans le cadre ci-dessous.

Tapez 'spellbinder' sur AMIGA ou 'st forever' (avec l'espace) sur ATARI lorsque le menu principal est affiché. L'écran devrait flashouiller. Quand vous démarrerez le jeu, le niveau de départ vous sera demandé. Ensuite utilisez les touches F1 à F5 pour changer d'arme, F6 pour le hunter, F7 pour le destroyer, F8 pour le shield et les touches de 1 à 5 pour la puissance de l'arme.

L'ART EST FACILE, LA CRITIQUE EST DIFFICILE

Ouaip, c'est pas facile tous les jours de retro-tester un jeu. D'une part, parce que tester un jeu c'est pas facile et d'autre part parce que la technologie étant en constante amélioration, il faut savoir contexualiser. Et en plus, tester un jeu, c'est difficile. (Ces 10 secondes de complainte du testeur vous ont été offertes par Marskilla).

Tentons, sans aucun espoir de succès, d'être objectif, parce que ce qui compte c'est pas l'issue, c'est le combat : je trouve que WoD a des défauts. Voilà, ca y est, je l'ai dit. Ca soulage. Comment ça, "c'est facile" ? Ok, ok...

Par moment je trouve les graphismes un peu "niaiseux", type pré-ado. Je ne nie pas qu'ils soient travaillés, c'est évident. Mais on aurait aimé un style un peu plus chanmax. Dragon Spirit / Dragon Saber par exemple -pour prendre une atmosphère comparable- est plus "mieux".

Ensuite, les fonds de niveaux (ceux qui scrollent) sont assez répétitifs. Autant dans certains shoots on se promène dans les niveaux émerveillé par les décors quand on a le temps de les admirer, autant dans WoD les décors sont un peu barbants.

Dernière chose, la musique a mal vieilli. Enfin, moi je trouve. Ca fait un peu penser à l'émission de break-dance qu'on regardait quand on était mômes (Je vous parle d'un temps, que les moins de 20 ans... ok, j'arrête). Vous vous souvenez, c'était avec un type nommé Sydney... Mais si ! Enfin... Allez faites un effort ! Quoi revenir aux moutons? Ah oui, hors sujet ? Vous êtes pas funs pour deux sous.

LA PROUESSE TECHNIQUE

L'INTERFACE UTILISATEUR

L'interface a été tout particulièrement soignée... D'accord, je vous l'accorde l'interface d'un shoot'em up c'est autrement moins impactant que celle d'un système d'exploitation. Mais quand même ça a son importance.

  • Le fait de pouvoir à tout moment revenir à l'écran titre en appuyant sur 'ESC' (pas de touche 'échap' sur ST/AMIGA, lol),
  • avoir ses scores sauvés sur la disquette (sans que ça plante si elle est protégée en écriture),
  • ne pas recharger les niveaux déjà en RAM (street fighter 2 sur ST/AMIGA, merci bien, sans façons),
  • avoir optimisé les routines de chargement pour que ça trace (compression des données à charger + routine accès disque)
    ,
  • la touche 'P' qui met en pause le jeu tout en laissant la musique tourner,
  • n'avoir à changer de disquette qu'une seule fois...

Toute cette "finition" luxueuse ne gâche rien, bien au contraire.

LES GRAPHISMES

En théorie une machine comme l'ATARI STe était limitée à 16 couleurs parmis une palette de 4096. En théorie.

Un bout de code astucieux permettait de s'affranchir de cette contrainte : le flipping. En fait, cela consiste à profiter de la faible qualité de notre capteur visuel intégré (oui, notre oeil. Ça va hein ? Et d'abord, pourquoi le corps humain n'aurait pas le droit lui aussi à son jargon technique hi-tech ?).

Je m'explique. Et pour ce faire, prenons un exemple. Imaginez que vous êtes sur une carte vidéo primitive avec deux couleurs : le blanc et le noir. Seulement voilà, vous voulez faire un joli dégradé pour votre superbe image et vous avez besoin de gris.

Une astuce pour en obtenir serait d'alterner super rapidement un pixel blanc et un pixel noir pour tromper la rétine et qu'elle voie du gris. Il vous faudrait donc deux images :


Image n°1

Image n°2

En les affichant alternativement rapidement, votre oeil verrait
à peu près ça : .

Et figurez vous que pour les couleurs c'est pareil. Ainsi les images de WoD affichant tout plein de couleurs sont en fait des images complètement flippées !!!


L'image titre avec moult couleurs (512).

Une des images composant le flipping ci-contre.
-non, votre moniteur n'est pas cassé-

Vous pouvez donc imaginer par où sont passés les programmeurs : coder un shoot plus un affichage qui jongle avec 16 couleurs parmis 4096 pour en produire plus (le double) à l'écran pendant le jeu!!! Pour info, avec cette technique on peut simuler jusqu'a 16384 couleurs sur STe (théoriquement et sur image fixe).

Si vous n'avez pas tout suivi, c'est pas grave, y'aura pas interro. Retenez seulement que WoD est vraiment unique en son genre par la qualité du flipping. Ce n'est pas le seul à faire ça, mais la manière dont il le fait est tout simplement excellente. Et puis le flipping n'est pas le seul "coding trick" (astuce de programmation) employé pour l'affichage. Ne vous inquiétez pas, j'arrête ici la prise de tête technique (pour cette fois).

LE SON

La bande son de WoD est, à l'instar du reste, très bien réalisée techniquement. Au son peu consommateur de place joué par un processeur sonore se mêlent des samples (on appelait ça "sons digitalisés" à l'époque), essentiellement pour la rythmique et certains effets.

J'ai fait plus que sous-entendre une comparaison avec Xenon2. Ce dernier avait une musique d'enfer (de Bomb The Bass, s'il vous plaît) lors de l'intro. Elle était, par contre, dénuée de samples pendant le jeu. Ici, on a du digit' tout le long du titre.


Si vous n'êtes pas équipé du plug-in flash, vous trouverez le fichier Mp3 ICI.

Oh certes, cela n'arrive pas à la cheville de l'orchestre symphonique de Londres, mais cela donne un certain cachet à la production sonore. On peut dire qu'alors, c'est ce qui se faisait de mieux. Vous trouverez des extraits de la version sortie de l'émulateur Steem (Atari STe) ci-contre. La qualité originale ne sera pas au rendez-vous, la (forte) compression MP3 et l'émulation étant passés par là. On ne le dira jamais assez, rien ne vaut la machine originale.

LE GAMEPLAY

Je vous parlais de la performance du code pour passer la barrière des couleurs du ST. Et bien, l'equipe d'ECLIPSE a également soigné son code au niveau gameplay.
Le jeu réagit très bien, le nombre de sprites affichés en même temps est impressionnant (surtout compte tenu de leur taille). Ca rame pas pour deux sous même avec de nombreux projectiles.

Une video valant mieux qu'un long discours, vous trouverez ci contre celle du premier niveau.

Si vous n'avez pas le plugin flash téléchargez la video (format flv).

En lançant la musique en même temps vous aurez une bonne idée du jeu. De même que pour le son, la video est fortement compressée... pour le plein écran, vaut mieux y jouer !!!

L'ADAPTABILITÉ

Autant la version AMIGA n'a pas ce problème, autant l'exécution sur les plateformes ST est relativement différente (allez donc voir l'article de SM pour plus de détails). La fracture sociale entre STf et le STe est grande. Que diable ! Mangeons des pommes et regardons un peu ce que nous a pondu Eclipse :

Et oui, c'est bel et bien un écran de setup. La RAM est détectée, la fréquence du moniteur (PAL-50Hz / NTSC 60Hz) est paramétrable, la puce sonore est identifiée et l'on peut choisir le type de son que l'on veut. On peut également gérer l'utilisation du blitter de la machine...

Le jeu permet également de choisir plusieurs modes en ce qui concerne la bande son :

  • music + : la musique "midi" + les samples musique + les bruitages digitalisés,
  • music : la musique "midi" + les bruitages digitalisés. En effet, les samples musicaux utilisant les mêmes canaux que les effets, (pour une sombre histoire technique que je vous passerai) en mode music + on a donc ni tous les samples ni tous les effets.
  • effects : les bruitages digitalisés.

Une tuerie technique vous dis-je...

CONCLUSION

WoD est un bon jeu, qui, même s'il n'a pas eu le succès commercial qu'il méritait, a laissé pantois les joueurs qui l'ont testé sur les ordinateurs 16 bits de l'époque. Tellement, qu'un remake PC est en cours (Merci à DoubleMG pour l'info).

Enfin, voici de quoi vous adonner à cette ambroisie sans modération:

La disquette 1 de la version ST:
La disquette 2 de la version ST:
La disquette 1 de la version AMIGA:
La disquette 2 de la version AMIGA :

Et tenez vous bien (Allez, faites un effort, tenez vous mieux !), sur la deuxième page de ce palpitant article vous trouverez tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la suite et la fin de la série : LETHAL EXCESS.